Une journée au Comme Chez Soi
J'ai eu 2** Michelin l'espace d'une journée !
Il est 7 heures du matin, encore un peu endormi, j'attends sur le quai n°3 de la gare des Guillemins le train qui me mènera à "la Capitale". Même si je vois bien aux costumes que revêtent certains voyageurs que ce samedi à lieu la Belgian pride (entendez la Gay Pride), ce n'est pas dans le quartier chaud de Bruxelles que j'ai rendez-vous mais au Comme chez Soi, le temple de la gastronomie belge.
Pour la petite histoire, c'est grâce à un concours organisé par les Chocolats Jacques que j'ai gagné (cupcake "Prohibition") que j'ai eu la chance de pouvoir l'espace d'une journée intégrer l'équipe de Lionel Rigolet. J'y retrouve Yves (Coolinary) qui va partager cette expérience avec moi.
C'est Daniel, le chef de la section chaude du restaurant qui nous accueille, nous présente l'équipe et nous fait visiter les lieux. Lionel Rigolet et son épouse Laurence ne tardent pas à nous rejoindre.
Cette journée est articulée autour de 3 thèmes. Le matin, aider la section pâtisserie à la mise en place du service de midi, assister au "coup de feu du service" et enfin la dé... gus...ta...tion !
Je vous propose de m'accompagner au travers de quelques photos dans ce théâtre du haut goût mais côté coulisses.
Mise en place "Section pâtisserie"
Fabrice et Thomas ont en charge la boulange, les desserts à l'assiette et les mignardises sous l'oeil bienveillant de Marcel, célèbre chef moustachu, vu, repéré et adulé dans l'émission de la RTBF présenté par Candice Kother "Comme un Chef". Alexandre, un des candidats de cette émission a même intégré la prestigieuse équipe de Lionel Rigolet.
Fabrice et Thomas - deux chefs français ayant en charge la pâtisserie et la boulange
Faire pousser la pâte à pain dans un film étirable évite tous débordements intempestifs et permet une régularité une homogénéité de la mie
Façonnage des pains à la duvel par Thomas
Les pains sont préparés chaque matin et contiennent tous les deux de la bière (Duvel et Leffe Brune) qui remplacera le levain en partie
Cuisson des petits pains pour le service de midi après un passage en chambre pour une deuxième pousse
Et oui ! Il n'y a pas que sur les blogs que l'on fait des macarons !
Les tuiles au parmesan des mises en bouches sont également confectionnées dans la section "pâtisserie"
Yves à la confection des brochettes de pâtes de fruits
Les assiettes de mignardises. P'tite question pour ceux qui suivent vraiment mon blog. Vous reconnaissez les demi-sphères vertes ?
La matinée est passée terriblement vite ! Même si j'ai passé beaucoup de temps à poser les 100.000 questions qui me venaient à la minute, j'ai pu façonner les billes de ganache (chocolat, raisin, baileys), confectionner des zestes d'orange confits, des décors en chocolats avec Fabrice et Thomas qui se sont montrés très disponibles et certainement pas avares de conseils ! Merci.
Bientôt le levé de rideau !
Midi. L'équipe se concentre car les premiers invités vont arriver. Lionel et Daniel sont au passe et préparent leur matériel. Si dans beaucoup de grandes maisons, le chef se contente de regarder si les assiettes sont correctement dressées, ici, ce n'est pas le cas. En effet, chaque chef de partie prépare sa recette mais ce sont les deux chefs qui procèdent au montage et dressage de chaque assiette (excepté le froid). Oui, oui, il y a encore de grands chefs étoilés qui travaillent dans leur cuisine.
Daniel attend le "coup de feu" qui sera réellement lancé après le retour des mises en bouche qui sont préparées par Alexandre, vous vous souvenez, le bogosse (il va m'en vouloir !) talentueux de la deuxième saison de Comme un Chef
Une des mises en bouche
On retrouve ici les tuiles parmesan préparées ce matin par la section "pâtisserie"
C'est au tour de Marcel (responsable du froid) d'entrer en scène. On le voit ici lors de la mise en place du plat de homard.
Salade parmentière au homard de la mer du Nord et aux truffes noires
Bonbon moelleux de sardine et saumon,
poudre de noisettes aux baies roses, émulsion de cressonnette
La terrine de lapereau repris dans le menu
La même terrine version "à la carte"
Pendant ce temps-là, la section chaude s'active comme dans un ballet parfaitement orchestré
Christophe, responsable "poissons" qui a eu fort à faire pendant ce service
Le poste "viande" s'active également
Vous savez d'où vient le mot "Maître queux" ?
Et les plats arrivent auprès des chefs qui s'activent au montage des assiettes
Moelleux de plates de Florenville au crabe, aux crevettes grises
et au Royal Belgian caviar, beurre blanc d'huîtres à la ciboulette
Montage des assiettes
Elbot sauvage rôti à l'origan zaatar, artichaut violet
aux parfums de Provence, laitue sucrine à l'huile d'olive
Daurade royale, bouillon de petits gris de Namur à l'estragon et au curry Madras
Le bouillon qui accompagne la daurade royale
C'est à ce moment qu''un client qui devait avoir 4 ou 5 ans arrive en cuisine en tenant la main d'un serveur pour s'adresser au Chef.
Du haut de son mètre, le p'tit bout énonce clairement :"Zef, ze voudrais des frites, steuplaît"
Du haut de son 3m20 toque comprise, le chef "Oui, si je peux avoir un bisou !"
Une fois le pacte scellé ... le client est roi !
La dégustation
Une fois les plats envoyés, c'est au tour du service "pâtisserie" de reprendre le flambeau mais là, nous avons eu la surprise de pouvoir déguster les trois desserts phares du restaurant, installés à la célèbre table d'hôte, celle-là même dressée en plein coeur des cuisines !
La table d'hôtes
Dessert tout framboise
Croquant chocolat, ganache caramel à la fleur de sel de Camargue,
riz soufflé, écume au Kahlua
Soufflé au citron vert et granité de mojito
Devinez qui a la fiche technique de ce soufflé ?
Alors que retenir de cette journée ?
Bizarrement, j'avais une boule au ventre avant d'entrer dans l'établissement. Même si j'étais conscient que cela allait être une journée superbe (Euh, c'est quand même le premier prix d'un concours, donc, ça devait être sympa !), je ne pouvais que penser que j'allais entrer dans un établissement qui porte depuis tellement longtemps la gastronomie belge au firmament. Tellement de grands noms se sont attablés au Comme chez Soi. J'étais intimidé ! Et pourtant, il m'en faut beaucoup.
Mais il a fallut très peu de temps pour se rendre compte que dans les coulisses se sont des personnes tout à fait comme vous et moi. La disponibilité de TOUT le personnel, la gentillesse de Daniel, l'omni-présence de Lionel, la douceur de Laurence, les tentatives de bzutage de Thomas (il a essayé de nous faire déguster une bizarrerie dont je ne me souviens même pas du nom et qui n'est vraiment pas destiné à cet usage !) nous ont mis tout de suite à l'aise. Nous étions intégrés dans une cuisine dont le mécanisme est très bien huilé sans heurt, sans cri, sans grincement de dent.
Et la cuisine me direz vous ? On est au coeur de la cuisine classique. Classique mais contemporaine. Pas de produits issus de l'industrie chimique, pas de technique relevant de la prestidigitation. Simplement une cuisine de saison privilégiant réellement le produit et les saisons et mettant l'accent sur une présentation résolument moderne. Une cuisine qui prouve si besoin en était que le classicisme est dans l'air de temps depuis toujours et pour longtemps.
D'un point de vue beaucoup plus personnel, je savais depuis enfant que je voulais être cuisinier, baigner dans cette atmosphère. Pourtant, c'est un métier dur, nécessitant beaucoup d'abnégation. Mais je me suis senti tellement à l'aise dans cet univers que je crois... je dis bien, je crois ... j'aurais pû en travaillant beaucoup en faire ma vie.
Alors merci le Comme chez Soi, merci Lionel et Laurence, merci l'équipe.